« Construisons ensemble une société solidaire »: un appel de 7 organisations chrétiennes
A l’occasion de son assemblée générale mercredi soir à la paroisse du Christ-Roi à Fribourg, l’œuvre d’entraide catholique a reçu les encouragements appuyés d’Anne-Claude Demierre, vice-présidente du gouvernement. Elle a remercié Caritas Fribourg pour "son engagement de tous les instants en faveur des plus faibles et des plus démunis" sans aucune distinction de confession, de nationalité et de statut. Elle a ainsi salué son combat pour une société plus juste et plus intégrative. Pour la conseillère d’Etat, Caritas Fribourg s’est imposée au fil des ans comme un interlocuteur incontournable des autorités pour redéfinir les contours des politiques publiques en faveur des plus faibles et des plus démunis.
Anne-Claude Demierre a également salué le fait que Caritas s’est également engagée "dans un formidable travail de fond, afin d’analyser les causes de l’exclusion et de la pauvreté, de les faire connaître au grand public ainsi qu’aux autorités, et de les combattre". Caritas a trouvé sa place "dans le maillage de notre filet social, avec compétence et dynamisme", en faisant preuve de créativité et d’audace, a poursuivi la conseillère d’Etat. Signe inquiétant: la tendance en matière d’endettement est à la hausse: "Les 300 ménages suivis par votre service de gestion des dettes ont accumulé près de 21 millions de francs de dettes. C’est énorme! Ces indicateurs doivent tous nous interpeller", a-t-elle lancé, en s’adressant à la septantaine de personnes présentes au Christ-Roi.
Dans le canton de Fribourg, a rappelé Anne-Claude Demierre, 18’000 personnes sont touchées par la pauvreté et 6’000 bénéficient des prestations de l’aide sociale. Evoquant les perspectives économiques moroses à l’horizon, la directrice de la santé et des affaires sociales a estimé que les milliards provenant de l’argent public ne devaient pas seulement servir à sauver les grandes banques ou la finance internationale. Il faut également investir dans le social!
"Notre filet social doit se renforcer avec ce qu’on lui accorde dans les budgets fédéraux et cantonaux. Et cela s’apparente de plus en plus à résoudre la quadrature du cercle… L’accès aux assurances sociales est toujours plus restrictif pour les plus précarisés, qui sortent de l’assurance maladie ou de l’assurance chômage parce que les critères d’admission se sont durcis ou parce que ceux de sortie se sont ramollis. Ces exclus terminent leur course dans la voiture balai de l’aide sociale, ou dans des structures telles que Caritas ou encore l’AI".
Dans son rapport annuel 2011, Petra del Curto, directrice de Caritas Fribourg, a souligné que l’association connaît aujourd’hui non seulement une forte augmentation des demandes d’aide adressées au Service de gestion de dettes et désendettement, mais aussi de celles adressées à la Consultation sociale.
L’exercice financier 2011 de Caritas Fribourg présente un résultat quasiment équilibré, avec un léger déficit de quelque 7000 francs pour un total de charges de 1’350’000 francs. Deux nouveaux membres sont entrés au comité de Caritas Fribourg: Mgr Rémy Berchier, vicaire épiscopal, désigné par l’évêque de Lausanne, Genève et Fribourg, ainsi que Diego Frieden. Cet habitant Fribourg, âgé de 27 ans, a été élu par acclamation par l’assemblée générale. Economiste au secrétariat central du syndicat Syna à Olten, il oeuvre déjà comme bénévole au service de Caritas Fribourg depuis 2010, en tant qu’écrivain public bénévole.
Diego Frieden est également secrétaire cantonal du Parti chrétien-social du canton de Fribourg. Le comité est à la recherche d’une deuxième candidature représentant la partie alémanique du canton de Fribourg. Deux membres du comité ont remis leur démission: Hans Schreiber, de Morat, et Patrick Marchioni, de Guin.
A la demande de l’Etat de Fribourg, Caritas s’est chargée de faire le lien entre le guichet social "Fribourg pour tous", ouvert en septembre dernier, et les organisations ecclésiales ou proches de l’Eglise qui exercent une activité caritative. Des contacts et une collaboration ont ainsi été établis avec les Conférences de Saint-Vincent de Paul. Pour renforcer l’aide à la gestion de budget dans le district de la Singine, Caritas Fribourg travaille désormais en étroite collaboration avec le service "Budgetberatung" dirigé par Marianne Hauser, à Planfayon.
L’édition 2012 de la CarteCulture, qui permet à des personnes à revenu modeste d’accéder à des prix très réduits à l’offre culturelle et sportive, englobe deux nouvelles communes: Bulle et Courtepin, s’ajoutant à celles du Grand-Fribourg. Caritas Fribourg peut compter, pour la promotion et la distribution de la CarteCulture, sur la collaboration des associations Pro Infirmis, Pro Senectute et Croix-Rouge fribourgeoise, avec lesquelles une convention a été signée.
Caritas Fribourg a initié en 2011 une étude de faisabilité en vue de l’implantation d’une épicerie sociale dans l’agglomération fribourgeoise. Effectuée en collaboration avec la Haute Ecole de Gestion (HEG) de Fribourg, l’étude avait pour but de déterminer les chances de succès d’un tel projet, tant du point de vue de la viabilité économique que de l’impact social. Beat Renz, président de Caritas Fribourg, a précisé, lors de l’assemblée, qu’au vu des résultats de cette étude – notamment sur la question du besoin effectif d’une telle épicerie et sur celle de son autofinancement -, le comité de Caritas Fribourg a décidé de ne pas poursuivre pour le moment ce projet, ou en tout cas de ne pas le poursuivre seul. Il a transmis l’étude à Caritas Suisse, qui est à l’origine du projet, en vue d’une concertation sur la suite qui pourrait lui être donnée. JB
Les demandes d’aide adressées au Service de gestion de dettes et désendettement de Caritas Fribourg sont en constante augmentation:
- nombre de consultations brèves et conseils: 173 en 2009; 224 en 2010; 286 en 2011 (+ 27,7% par rapport à 2010 et + 65% par rapport à 2009);
- nombre de suivis: 279 en 2009; 294 en 2010; 295 en 2011
Le nombre de demandes d’aide traitées par la Consultation sociale est passé de 245 en 2009, à 276 en 2010, et à 460 en 2011 (+ 66%). Cette tendance à la hausse devrait se poursuivre, notamment en lien avec le développement des prestations du guichet social "Fribourg pour tous". En effet, les premiers mois de fonctionnement de ce guichet social ont démontré que Caritas Fribourg est l’organisation vers laquelle le nombre le plus important de personnes est réorienté. JB
Soulignant l’importance que l’évêque diocésain, Mgr Charles Morerod, attribue à la diaconie au sein de l’Eglise fribourgeoise, Mgr Rémy Berchier va visiter les Unités pastorales pour les sensibiliser à cette dimension, pour laquelle Caritas joue un rôle de premier plan. Le vicaire épiscopal a alors présenté le défi pastoral et social qui s’invite aujourd’hui: l’arrivée massive dans le canton de familles portugaises depuis l’automne dernier. Célia Lisboa Lopes, auxiliaire pastorale auprès de la Mission catholique de langue portugaise à Fribourg, a décrit une situation qui empire de jour en jour: ces familles fuient une crise économique et sociale de plus en plus insupportable. "Les demandes d’aide à la Mission, d’une manière générale, ont augmenté d’environ 80%. Elle doit désormais fournir une aide sociale débordant largement ses compétences et ses moyens".
"Beaucoup au Portugal font l’expérience qu’au retour de leurs congés, l’entreprise pour laquelle ils travaillaient a été fermée et les salaires ne sont pas et ne seront plus versés", témoigne Célia Lisboa Lopes. Dans l’impossibilité de payer les crédits pour leur maison, les gens perdent leur logement. Ils pensent que la solution est de s’expatrier dans un autre pays et particulièrement en Suisse, un pays qui leur apparaît moins touché par la crise".
Au rythme de 3 à 4 familles par semaine, près de 11’000 Portugais sont entrés sur le territoire suisse en moins d’une année, dont plusieurs centaines dans le canton de Fribourg. "Beaucoup dorment dans les gares, les trains, les voitures, sous des ponts. Ils sont démunis, n’ont aucun bien, pas d’argent, pas de travail. Ils ne disposent d’aucune relation, ni de connaissances en Suisse. Beaucoup ne parlent pas le français… Les enfants ne sont plus scolarisés, mais demandent leur inscription au catéchisme de la Mission. Et toujours plus nombreux sont les baptêmes!"
Certains diplômés, même avec de bonnes qualifications, ont de la difficulté à trouver un emploi en raison de la crise, qui affecte également la Suisse. "Alors, pour survivre, ils n’hésitent pas à prendre le premier travail qui se présente: ils nettoient, ils travaillent dans les métiers du bâtiment ou de l’hôtellerie-restauration. Certains sont prêts à trimer pour des salaires de misère, causant du dumping salarial, ce qui n’est pas sans créer des tensions". La communauté portugaise installée en Suisse, qui s’est montrée jusqu’à maintenant très solidaire, commence ainsi à se diviser. Célia Lisboa Lopes remarque que ses compatriotes continuent à se déplacer de façon précipitée, imprudente, sans penser aux difficultés qu’ils pourront rencontrer, sans contrat de travail et sans connaître personne. "Beaucoup n’ont jamais entendu parler de la nécessité d’un permis de séjour, et ne savent pas que, pour l’obtenir, il faut avoir un contrat de travail. D’autres n’ont jamais entendu parler des assurances obligatoires en Suisse, telles que l’assurance maladie ou l’assurance ménage, par exemple. Nous ne pourrons pas passer un deuxième hiver de la même manière!" (apic/be)
Rendez-vous à Mulhouse le 11 mai !!!
Concert annuel au Temple Saint-Etienne de Mulhouse !
Rendez-vous le vendredi 11 mai 2012 à 20h30
au Lions Club Mulhouse-Illberg
L'intégralité des recettes sera reversée au profit des plus pauvres des Conférences Saint-Vincent-de-Paul et pour la rénovation des orgues Walcker du temple Saint-Etienne
* DES
PÈLERINAGES dans le Hoggar sur les pas de Charles de Foucauld sont régulièrement organisés.
Se renseigner dans votre diocèse. Ou contacter l'agence Ictus. Tél. : 01.41.12.04.81. Site internet : Ictusvoyages.com.
* TROIS RELIGIEUSES vivent en fraternité à côté de l'ermitage de la Frégate. Adresse : Petites soeurs du Sacré-Coeur, BP 76, 11000 Tamanrasset. Algérie. E-mail : psoeurstam@yahoo.fr
* UN LIVRE DE RÉFÉRENCE : Charles de Foucauld. Le Chemin vers Tamanrasset, Antoine Chatelard, (Ed. Kharthala).
Au vu des questionnaires remplis par les jeunes durant l'intervention de la Conférence SVP / St Léon du 15.03 2012 matin, je me suis permis de faire une petite synthèse des réponses données.
SYNTHESE DES REPONSES AU QUESTIONNAIRE « SOLIDARITE »
(journée « Solidarités » 15.03.2012 / ST ANDRE COLMAR / 2 classes de 3ème du jeudi matin, environ soixante élèves)
1) POUR VOUS, QU’EST-CE QUE LA SOLIDARITE ?
* les jeunes ont répondu en exprimant différents types d’intervention :
- aider son prochain en difficulté, dans le besoin (env. 25x) : quelques exemples : camarade non intégré, vêtements pour enfants pauvres, aliments pour associations, …)
- apporter de l’aide (9x)
- s’entraider (5x)
- aider ou partager avec les autres (4x)
- être solidaires entre nous
- aider les jeunes, les personnes âgées ayant des difficultés comportementales ou des problèmes de logement
- aider les personnes qui souffrent
- aider ceux qui ont du mal à vivre
- aider ceux qui n’ont pas les moyens de se loger, d’acheter à manger
- aider ceux qui n’ont pas de sous
- aider une personne démunie sur tous les fronts
- aider les personnes, pas seulement celles qui sont dans le besoin ; aider dans n’importe quel âge et pour n’importe quels problèmes ;
* certains élèves ont répondu en essayant de définir un état d’esprit :
- l’aide par le bénévolat
- aider les pauvres, en étant présent (2x), en les soutenant (4x)
- l’esprit d’aide
- la charité (2x)
- rendre service
- porter compagnie
- réunir les personnes (2x)
- le partage (3x), partager nos biens, partager sa bonne humeur
- le don de soi-même aux personnes en difficulté, en situation de nécessité (2 x)
- donner quelque chose gratuitement, donner de son temps et de son énergie
- faire goûter à la vie
- écouter
- ouvrir son cœur
- sourire (« ce n’est certes pas beaucoup, mais peut toujours réchauffer un cœur »)
- la gentillesse
- la devise de la Sté de St Vincent de Paul : « aimer, partager, servir » ;
* deux jeunes ont exprimé un ressenti :
- c’est quelque chose de bien
- c’est très émouvant.
2) Citez des actions que vous avez réalisées en faveur d’une personne en difficulté
* Les expériences évoquées ou décrites sont variées et particulières à chacun des jeunes ; elles peuvent néanmoins être regroupées en plusieurs domaines :
- les dons matériels :
° aux SDF, particulièrement sous forme de quelques pièces, de nourriture (un sandwich, des boissons, une compote, une banane, son propre petit pain) ; plus original : des croquettes pour le chien
° aux personnes en difficulté : don d’argent, parfois avec les parents, « 50 Euros du porte-monnaie à une dame dans le besoin », « 20 Euros reçus pour un ballon et donnés pour manger à un mendiant qui en avait plus besoin que moi », achat de conserves, « des affaires et des sous à presque toutes les occasions », « des bonbons à quelqu’un qui ne pouvait pas se les acheter », vêtements, anciens habits à un camarade de classe, ancien canapé, paiement d’une veste à un ami, d’un loyer, du cinéma et de la patinoire, aide à la maman en prélevant sur ses économies
° aux personnes âgées : en groupe fabrication et don de bricolages, « aide à la mamie quand son salon a brûlé »
° aux associations, parmi lesquels de l’argent pour les « Restos du cœur », les « pièces jaunes tous les ans », à « Emmaüs » et « Espoir », des meubles pour « Espoir » et l’achat de calendrier, des habits (trop petits, de bonne qualité), des jouets
° à la banque alimentaire, avec les parents
- le service rendu, dont l’aide au ménage et au jardin, aux courses, l’aide fréquente à un voisin pour monter les courses ; particulièrement pour les personnes âgées, l’aide à porter les affaires, à traverser la route, à se lever, à se déplacer, au ménage ; « avec les parents, l’hébergement du parrain et des cousines lors du décès de la tante, et une aide financière » ; un prêt d’argent à un ami
- les engagements divers : courses de la solidarité, kermesse, « un grand pique-nique où les invités donnent un petit quelque chose », « aide aux filles d’un orphelinat en Egypte avec le Centre Th. Monod (campus) depuis 4 ans », garde d’enfants ; un élève cite le don d’organe pour une personne malade
- le soutien : moral, l’aide psychologique à la famille et aux amis, « une aide à la grand’mère pour se remettre de la mort du grand-père », « un réconfort dans la douleur », l’aide à quelqu’un lors du divorce de ses parents, l’amitié avec un élève invité « à la chorale, à domicile chaque samedi pour le repas, et à accompagner aux concerts », une visite à une personne âgée seule, essai de conseiller ou de se tourner vers les associations caritatives, l’écoute du problème pour en déceler l’origine et la façon d’aider et en parler aux personnes qualifiées pour une aide effective
- pour le futur, un élève envisage si possible son aide financière aux associations
3) AVEZ-VOUS DES IDEES POUR VOUS INVESTIR DANS LA SOLIDARITE ?
* Contrairement aux questions précédentes, où chacun a répondu, 25 jeunes indiquent ici qu’ils n’ont pas d’idées, ou ne répondent pas à la question ; défaut d’imagination ou manque de temps pour approfondir la réflexion ? Pour l’un d’eux, la chose est plus claire : « pourquoi aider, alors que l’on doit se débrouiller par ses propres moyens ? »
Pour les autres :
- davantage aider les personnes qui en ont beaucoup besoin (5 x, dont 1x pour contester un exemple donné durant l’exposé : « et pas juste pour aider un enfant à aller en classe verte ») ; aider les personnes dans la rue et donner de quoi manger ; aider les pauvres à s’en sortir ; aider le plus de personnes possibles ;
- aider les personnes âgées, leur donner à manger, jouer avec elles ; « aider à marcher et à porter les affaires, comme pour sa mamie » ; aller chez ses grands–parents ; réaliser concrètement des actions de soutien aux personnes âgées et démunies ;
- partager avec les personnes dans le besoin ; faire des dons d’argent et de nourriture ; « si j’ai un métier et que je gagne de l’argent, en donner un peu aux gens dans le besoin, donner de mon temps » ;
- créer des associations caritatives ; faire des voyages avec des associations pour aller dans des pays, voir et aider ; réunir du monde, sensibiliser à l’entraide ; faire partie d’une association ; « je suis déjà dans une association et j’aime aider » ; appeler les associations pour l’aide aux pauvres ; plus de bénévoles sur le terrain ;
- aider à trouver du travail ;
- « récolte chez les personnes qui ont les moyens pour création d’un grand foyer où les plus pauvres peuvent déposer les affaires et les récupérer si besoin » ; créer de nouveaux foyers (magasins spéciaux)
- faire rire, divertir, jouer à la console.
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La question est redoutable : comment pouvons-nous vivre concrètement l’attention au frère ? En effet, derrière cette interrogation apparemment banale, il n’est pas possible de se
cacher. Alors, montent du fond de mon histoire tous ces moments où la fidélité à ce devoir d’attention, porté par toute la Révélation, n’a pas été à la hauteur… Car la première expérience
que je fais est celle d’une limite. Oui, bien souvent, cette attention aux personnes et aux situations pointe en moi un
manque. Le premier constat est là : je ne parviens pas à accueillir toutes les situations de détresse, de souffrance, d’indifférence…
Certes, je pourrais me trouver des excuses mais nous savons que chercher à se justifier n’est pas la bonne voie. Si je ne parviens pas à avoir cette qualité d’attention à l’autre dans une
large « extension » comme je pourrais le rêver, j’ai pourtant fait un choix : vivre l’attention à l’autre dans une qualité de relation, au moment où la rencontre est vécue. Mon désir
profond est bien d’être tout
entier à celui que je croise. D’une certaine manière, c’est lui signifier par une capacité d’écoute : « Quand je suis avec toi, rien n’a plus d’importance ! Tu es important pour moi. Ta
joie, tes soucis, tes doutes, tes incompréhensions, tes élans de charité… Tout m’importe, ici et maintenant, parce
que c’est ta vie animée de l’Esprit. » Le temps est comme suspendu. Finalement, rien n’est à la seconde dans notre vie de prêtre. Je veux savourer cette rencontre. Il ou elle repartira sans
que j’aie dit grand-chose. L’important n’était pas dans une possible abondance de paroles mais dans cette écoute et cette bienveillance, dans cette empathie et cette compassion. « Soyez
joyeux avec ceux qui sont dans la joie, pleurez avec ceux qui pleurent. » (Rm 12, 15).
Dans cette attention, je ne redoute pas le silence. « Je me suis souvent repenti d’avoir parlé, mais jamais de m’être tu », disait Philippe de Commynes. C’est aussi cette attention dans le silence qui transcende les mots auprès du souffrant. Qualité de présence et de silence qui laisse place à l’Autre et où l’attention n’est plus une vertu mais la qualité de notre être, tout simplement parce que nous n’aurons pas pris toute la place, mais que se sera dégagé un espace pour que l’Esprit Saint parle au coeur. S’il fallait nommer une autre manière de manifester une attention à mes frères, j’évoquerais volontiers la prière. Cela peut sembler paradoxal, mais par ce « lieu » de la prière je rejoins ceux que je ne peux accueillir. Cela fait partie d’une vie de charité ; prier pour ceux qui n’ont pas les mots, la liberté pour le faire. La prière affine notre sens de l’attention à l’autre. Cela passe par l’attention au Christ, à sa Parole qui donne crédit à la parole de l’autre. //
+ Père Emmanuel Coquet
Chapelain de Notre-Dame-du-Saint-Sacrement à Paris
CATHERINE MONIN
© Bibliothèque de l'Assemblée nationale - Photo Irène Andréani
Le discours de Victor Hugo appuie la proposition d’Armand de Melun visant à constituer un comité
destiné à « préparer les lois relatives à la prévoyance et à l’assistance publique ».
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Je ne suis pas, messieurs, de ceux qui croient qu’on peut supprimer la souffrance en ce monde ; la souffrance est une loi divine ; mais je suis de ceux qui pensent et qui
affirment qu’on peut détruire la misère.
Remarquez-le bien, messieurs, je ne dis pas diminuer, amoindrir, limiter, circonscrire, je dis détruire. Les législateurs et les gouvernants doivent y songer sans cesse ; car, en
pareille matière, tant que le possible n’est pas fait, le devoir n’est pas rempli.
La misère, messieurs, j’aborde ici le vif de la question, voulez-vous savoir jusqu’où elle est, la misère ? Voulez-vous savoir jusqu’où elle peut aller, jusqu’où elle va, je ne dis
pas en Irlande, je ne dis pas au Moyen Âge, je dis en France, je dis à Paris, et au temps où nous vivons ? Voulez-vous des faits ?
Il y a dans Paris, dans ces faubourgs de Paris que le vent de l’émeute soulevait naguère si aisément, il y a des rues, des maisons, des cloaques, où des familles, des familles entières,
vivent pêle-mêle, hommes, femmes, jeunes filles, enfants, n’ayant pour lits, n’ayant pour couvertures, j’ai presque dit pour vêtement, que des monceaux infects de chiffons en
fermentation, ramassés dans la fange du coin des bornes, espèce de fumier des villes, où des créatures s’enfouissent toutes vivantes pour échapper au froid de l’hiver.
Voilà un fait. En voulez-vous d’autres ? Ces jours-ci, un homme, mon Dieu, un malheureux homme de lettres, car la misère n’épargne pas plus les professions libérales que les
professions manuelles, un malheureux homme est mort de faim, mort de faim à la lettre, et l’on a constaté, après sa mort, qu’il n’avait pas mangé depuis six jours.
Voulez-vous quelque chose de plus douloureux encore ? Le mois passé, pendant la recrudescence du choléra, on a trouvé une mère et ses quatre enfants qui cherchaient leur nourriture
dans les débris immondes et pestilentiels des charniers de Montfaucon !
Eh bien, messieurs, je dis que ce sont là des choses qui ne doivent pas être ; je dis que la société doit dépenser toute sa force, toute sa sollicitude, toute son intelligence,
toute sa volonté, pour que de telles choses ne soient pas ! Je dis que de tels faits, dans un pays civilisé, engagent la conscience de la société tout entière ; que je m’en
sens, moi qui parle, complice et solidaire, et que de tels faits ne sont pas seulement des torts envers l’homme, que ce sont des crimes envers Dieu !
Vous n’avez rien fait, j’insiste sur ce point, tant que l’ordre matériel raffermi n’a point pour base l’ordre moral consolidé !
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Victor Hugo : « Détruire la misère »
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Site Nikita